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Les fumées d'incendie

 

 

Ne vous inquiétez pas Docteur, j'inhale pas la fumée... 

 

 

 

Les fumées d'incendie causent 1,5 million de morts chaque année à travers le monde d’après The Lancet. Elles représentent le risque le plus important lors d'un sinistre, particulièrement en milieu clos et sont responsables de 80 % des décès liés aux incendies. Cela est lié principalement en raison de leur toxicité immédiate (monoxyde de carbone, cyanures, irritants respiratoires) et mais aussi par leurs effets retardés (30 % de mortalité cardio vasculaire, 15 % de mortalité en lien avec des maladies respiratoires). 

Une prise en charge précoce et rigoureuse est indispensable pour prévenir les complications, notamment respiratoires et hémodynamiques.

 

 

Risques liés aux fumées d’incendie

L’inhalation de fumées expose à plusieurs toxiques :

  • Monoxyde de carbone (C.O.) : responsable d’une hypoxie tissulaire en raison de son affinité élevée pour l’hémoglobine (HbCO).
  • Cyanures : issus de la combustion de matières synthétiques, ils inhibent la chaîne respiratoire mitochondriale.
  • Irritants respiratoires : provoquent des inflammations ou des œdèmes des voies aériennes.

Un état initial rassurant ne garantit pas l’absence d’évolution secondaire. Les détériorations respiratoires ou hémodynamiques peuvent être retardées, justifiant un suivi attentif.

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Prise en charge préhospitalière

Les victimes présentent souvent un tableau mélangeant :

  • Signes d'intoxication (tachycardie, tachypnée, dyspnée, confusion).
  • Stress aigu : généré par le contexte d'incendie. 

Les facteurs psychosociaux (interactions avec pompiers, forces de l'ordre, recherche des proches, perte d’objets de valeur, assurances) peuvent distraire les patients et réduire leur coopération.  Il est pourtant essentiel de mener un examen rigoureux.



 

Interrogatoire initial

  • Nature de l’exposition : durée, environnement clos ou ouvert.
  • Implication dans l’incendie : actions menées (lutte contre les flammes).
  • Antécédents médico-chirurgicaux : comorbidités préexistantes.
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Examen clinique

Les signes recherchés incluent :

  • Dyspnée.
  • Raucité de la voix ou dysphonie (témoignant d’une inflammation laryngée).
  • Toux (irritation des voies aériennes inférieures).
  • Traces de suie évidentes (autour du nez ou de la bouche) ou masquées (fond de gorge, palais mou, vibrisses nasales brûlées).
  • Crachats contenant de la suie.
  • Céphalée (pouvant témoigner d’une intoxication au CO)
  • Douleur thoracique (cardiopathie de stress, syndrome coronarien aigu de type 2)

Un patient conscient qui ne tousse pas n’est pas synonyme de patient non exposé aux fumées. Au contraire, lors d’expositions sévères et/ou prolongées aux fumées, divers mécanismes abolissent ce réflexe : atteinte des récepteurs de la toux, épuisement respiratoire, atteinte des muscles respiratoires par intoxication au cyanure, altération de la conscience.

Tout patient, qu’il tousse ou non, doit être consciencieusement examiné. L’absence de toux ne doit pas être un facteur rassurant.



 

Compléments d’investigation

En préhospitalier : 

  • Mesure de la SpCO (saturation en CO) : utile mais parfois imprécise.
  • Lactatémie capillaire : évalue une intoxication au cyanure.
  • Électrocardiogramme (E.C.G.) : à la recherche de signes d’hypoxie myocardique.

En milieu hospitalier : 

  • Gazométrie artérielle : mesure directe de l’HbCO.

Fibroscopie bronchique : Rare mais parfois réalisée pour visualiser l’atteinte des voies respiratoires basses chez les patients les plus sévères.

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Les traitements

  1. Soustraction à l’exposition : retrait immédiat de la zone à risque.
  2. Oxygénothérapie :
    • Haut débit (15 L/min) en préhospitalier.
    • Oxygénothérapie hyperbare dans certains cas d’intoxication au CO.
  3. Hydroxocobalamine (Cyanokit) : antidote de première intention en cas d’intoxication cyanurée fortement suspectée.
  4. Nébulisations par béta-2-mimétiques (salbutamol) : pour réduire l’inflammation des voies aériennes.
  5. Réanimation : en cas d’arrêt cardio-respiratoire, intubation et ventilation mécanique.



 

Surveillance et éducation

Les patients non hospitalisés doivent recevoir des consignes claires pour surveiller l’éventuelle apparition retardée de :

  • Dyspnée ou toux persistante.
  • Confusion ou troubles neurologiques.
  • Douleurs thoraciques ou faiblesse musculaire.

Il est essentiel de les encourager à contacter le centre 15 en précisant leur exposition récente aux fumées d’incendie. En effet, l’absence de gravité initiale n’est pas corrélée à l’absence de décompensation secondaire de pathologies sous-jacentes (asthme, pathologie cardiaque, BPCO,…).

 

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Les points clés

 Les fumées d'incendie sont responsables de 80 % des décès liés aux incendies, principalement à cause de leur toxicité immédiate (CO, cyanures, irritants respiratoires)

 Un état initial rassurant chez une victime de fumées d'incendie ne garantit pas l'absence de complications respiratoires ou cardiovasculaires retardées

Une prise en charge précoce, incluant oxygénothérapie et antidotes spécifiques, est essentielle pour prévenir la décompensation hémodynamique et respiratoire

 

 

 

 

 

Les sources de l'article :
Guide pratique des urgences médicales. Axel ELLRODT. Ed. Estem
https://www.revmed.ch

 

 

Les sources image :
https://theconversation.com
https://www.closermag.fr
https://snspp-pats.com
https://www.infirmiersapeurpompier.com

Date de dernière mise à jour : 30/04/2025

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