La saturation se mesure par pléthysmographie

Saturation : Ne vous fiez pas aux appareils !

Dans les différentes valeurs du bilan hémodynamique, la saturation pulsée en oxygène, couramment désignée par « sat » ou « saturation », et abrégée en SpO2, est un paramètre clé. Cette mesure est non invasive et peut être réalisée dès les premiers secours à l'aide d'un dispositif appelé « saturomètre ».

Les cellules de l'organisme ont besoin d'oxygène pour fonctionner. Cet oxygène est transporté par le sang depuis les capillaires pulmonaires grâce à une protéine nommée hémoglobine. En cas de défaut de transport de l’oxygène par le sang, une hypoxémie peut survenir, entraînant une hypoxie, conduisant à la formation de lactates. La saturation représente le pourcentage d'hémoglobine saturée en dioxygène, reflétant ainsi l'efficacité du système respiratoire à oxygéner le sang.

Physiologiquement, chez un individu en bonne santé, la saturation normale est comprise entre 95 % et 100 %. Des valeurs inférieures indiquent la nécessité d'apporter de l'oxygène au patient pour améliorer sa diffusion au niveau de la barrière pulmonaire.

093

Dans le cas de la broncho-pneumopathie chronique obstructive, la saturation peut varier entre 88 % et 92 %. Il est important de noter qu'une saturation inférieure à 90 % en air ambiant doit alerter le clinicien quel que soit le terrain du patient.

Le saturomètre, aussi nommé « oxymètre de pouls », est un appareil équipé d'un capteur comportant un émetteur de lumière et un récepteur. Il existe plusieurs formes de capteurs :

  • Capteurs en forme de pince : généralement utilisé chez les adultes, ils se positionnent souvent au bout des doigts ou, pour les modèles plus petits, sur les lobes d'oreille.
  • Capteurs en forme d’embout : ils forment un embout en caoutchouc et fonctionnent lorsque le doigt est inséré dedans. Il en existe de différentes tailles, tant pour les adultes que pour les enfants.
  • Capteurs adhésifs : plus courants en pédiatrie, ils peuvent être appliqués sur le bout des doigts, des orteils, des lobes d'oreille, ou encore sur le front ou le nez.

Le fonctionnement du saturomètre repose sur la mesure des variations d'absorption des faisceaux infrarouges lors du passage du sang dans les vaisseaux des extrémités. La transmission lumineuse est fonction la concentration en oxygène de l’hémoglobine. En effet, l’HbO2 (hémoglobine oxygénée ou oxyhémoglobine) absorbe plus la lumière dans les rayonnements infrarouges que la désoxyhémoglobine (hémoglobine non oxygénée ou Hb).

Lorsque la mesure est effectuée, l'appareil affiche la valeur numérique de la saturation sur son écran. La fiabilité de cette mesure peut être évaluée en examinant deux indicateurs de perfusion :

  • L'aspect de l'onde de pouls, qui doit présenter une sinusoïde régulière.
  • Le diagramme à barres, qui doit monter à la même fréquence que le pouls mesuré manuellement.

Toutefois, cette mesure peut être altérée par divers facteurs :

  • Vasoconstriction périphérique : Lorsque les extrémités sont froides, la perfusion tissulaire peut être suboptimale, entraînant une mesure erronée. Il peut être nécessaire de réchauffer les extrémités ou de repositionner le capteur.
  • Présence de vernis à ongles ou de prothèses ongulaires : Ces éléments peuvent interférer avec la mesure. Il est possible d'orienter le capteur d'un quart de tour (mesure latérale du doigt) ou de le déplacer vers d'autres sites, tels que l'oreille.
  • Pathologies cardiaques : Certaines conditions, comme la fibrillation auriculaire ou le flutter, peuvent entraîner une circulation sanguine non optimale, faussant ainsi la mesure. En cas de doute, il est recommandé de corréler l'indice de perfusion avec une mesure manuelle du pouls ou une surveillance électrocardiographique.
  • Baisse du débit cardiaque : Cette situation peut résulter d'une diminution de la pression artérielle, d'une réduction du travail cardiaque ou d'un état de choc.
  • Inadéquation de la taille du capteur : Un capteur trop petit peut comprimer le doigt, affectant la mesure. De même, la mesure de la saturation peut être faussée si un brassard de tension est appliqué en amont. Il est préférable de repositionner le brassard ou d'attendre la fin de la mesure pour effectuer l'interprétation.
  • Excès de lumière ambiante : Une illumination excessive, notamment par des néons, peut perturber la mesure. Il est recommandé de couvrir la zone de mesure avec un vêtement pour minimiser cette interférence.
  • Coloration de la peau : Étant donné que la mesure de saturation est transdermique, la présence de mélanine, pigment présent en quantités variables chez les individus de couleur, peut influencer la précision de la mesure.

Tout au long de la prise en charge, il est essentiel de garder à l'esprit que la mesure de la saturation ne doit pas se substituer à l'examen clinique. Par exemple, certaines crises d'asthme peuvent ne pas présenter de désaturation, alors que des signes tels qu'un balancement thoraco-abdominal ou des marbrures ou l’impossible de parler peuvent indiquer un état critique. Il est donc primordial de rester vigilant et d’adopter une approche clinique globale.

On ne le répètera jamais assez… Ne vous fiez pas aux appareils, restez clinique !

093

 La mesure de la saturation en oxygène constitue un outil simple et rapide pour évaluer la fonction ventilatoire du patient

 De nombreux facteurs peuvent altérer cette mesure ; il est donc essentiel de s'adapter aux caractéristiques spécifiques de chaque patient

 Une détresse respiratoire ne conduit pas systématiquement à une désaturation, comme cela peut être observé dans le cas de l'asthme

 Un patient qui parle aisément ne doit pas avoir une mesure anormale de la saturation

Les sources de l'image
https://www.facebook.com
https://images.google.fr

Date de dernière mise à jour : 11/10/2024

Questions / Réponses

  • De François Xavier B.|07/11/2024

    Bonjour
    En tant que secouriste, on m'a enseigné tout ce que j'ai pu lire dans l'article. Toutefois, un ami à moi, formateur ambulancier en France et Paramedic au Canada, me disait il y a quelques années, que l'on disait à tort que le saturomètre donnait la saturation en O² dans le sang. Selon lui, la saturomètre donne la saturation DES gaz dans le sang, et plus particulièrement par l'hémoglobine. Du coup en accident spéléo la victime peut avoir une Sat satisfaisante alors qu'en fait elle sature en CO2. De même en incident urbain (chaudière ou autre), la victime aura une Sat satisfaisante alors qu'elle est saturée de CO. Ce qui explique d'ailleurs que les SP soient équipés d'appareils pour le quantifier chez les victimes.
    Du coup c'est ce que j'explique à mes stagiaires depuis pas mal de temps.... à tort ? Dois-je pondérer mon discours ?
    Qu'en pensez-vous ?

  • L'équipe Site du Scope

    Bonjour, 

    Merci pour cette question très pertinente, qui aborde un point souvent mal compris.

    La phrase "le saturomètre donne la saturation DES gaz dans le sang" prête à confusion et n’est pas exacte d’un point de vue médical. 

    En réalité, le saturomètre mesure spécifiquement la saturation en oxygène (SpO₂) dans le sang, grâce à une analyse spectrophotométrique. Cette méthode repose sur la différence d'absorption lumineuse par les différentes formes d'hémoglobine. Plus précisément, l'oxyhémoglobine (HbO₂) absorbe les infrarouges différemment de la désoxyhémoglobine (HbCO₂). Seule la longueur d'onde de l'HbO₂ est prise en compte par la machine donnant une valeur en pourcentage d'hématie dans les capillaires artériels correspondant à cette longueur d'onde.

    Cependant, le monoxyde de carbone (CO) a une absorption spectrale similaire à celle de l’oxyhémoglobine, ce qui empêche le saturomètre de les différencier. Ainsi, chez un patient intoxiqué au CO, le saturomètre pourrait afficher une saturation en oxygène normale, alors que la capacité de transport de l'oxygène est compromise en raison de la formation de carboxyhémoglobine (HbCO). En d'autres termes, le saturomètre ne mesure pas le CO lié à l'hémoglobine. Il "pense" ne mesurer que l'HbO₂ et ne discrimine par l'HbCO. La saturation au doigt, dans ce cas, n'est pas le reflet de l'oxygénation tissulaire. 

    De plus, lorsqu'un patient à 6% de SpCO (mesuré par gazométrie artérielle), celle ne signifie pas qu'il aura une SpO₂ de 94% (il aura d'ailleurs probablement 99% de saturation). En effet, un patient fumeur depuis quelques années à une SpCO "habituelle" entre 5 et 10% et pourtant une SpO2 pouvant atteindre 99 à 100%.

    Lors des accidents de spéléologie, un patient peut être sévèrement hypercapnique (avec un excès de CO₂ dans le sang) tout en présentant une saturation normale au saturomètre, ce qui ne signifie pas que la situation est bénigne. La gravité de l’état du patient réside dans l’excès de CO₂, et non dans un manque d’O₂. Ce n'est absolument pas la même chose. Toutefois, à terme, les patients hypercapniques finiront par présenter une désaturation en O₂ par différents mécanismes (fatigue musculaire, hypoventilation, ...). Un exemple pour illustrer cela ; lorsque l'on fait respirer temporairement un patient en crise d'angoisse (donc qui hyperventile) dans un sac hermétique, on ne fait pas chuter sa SpO₂. On augmente simplement sa capnie (SpCO₂) en lui faisant respirer son propre CO₂ expiré. Cela diminue par réflexe physiologique la fréquence respiratoire et normalise la capnie élevée du patient. Ainsi cela stoppe les symptômes d'hypocapnie (causés par l'hyperventilation) que le patient pouvait présenter avant, sans retentissement sur sa saturation. Cela prouve que l'on peut temporairement augmenter sa SpCO₂ sans diminuer sa SpO₂.

    En conclusion : Le saturomètre ne donne pas la saturation DES gaz dans le sang mais que d'un seul, l'O₂. Et une bonne saturation ne signifie pas qu'il n'existe aucun problème respiratoire (confusion souvent faite), seulement pas de trouble grave des échanges alvéolocapillaire de l'O2 (atteinte potentiellement mortelle à court terme pour un patient).  

    Le saturomètre est un outil d'une grande fiabilité, mais il possède des limites dont son incapacité de différencier l'HbO₂ de l'HbCO, ce qui rend l’appareil inadapté pour évaluer la possibilité ou la gravité d'une intoxication au CO. Comme tu l’as mentionné, dans ces cas, des appareils spécialisés doivent être utilisés (comme ceux disponibles dans les services préhospitaliers).

    Je recommande de maintenir cette position auprès d'apprenant ou de collègue : le saturomètre est conçu pour estimer uniquement la saturation en O₂ et doit être utilisé en conséquence. Il ne doit pas être utilisé pour rechercher une intoxication au CO ou au CO2. Et une saturation au doigt satisfaisante ne signifie pas qu'il n'y a aucun souci. Il est essentiel d'expliquer clairement aux apprenants les limites du saturomètre.

    J'espère que cela répond à votre question. N'hésitez pas à revenir vers moi pour toute autre précision.

Anti-spam
 
4 votes. Moyenne 5 sur 5.