Des boites qu’il vaut mieux ne pas ouvrir…
Les Blood boxes
Le corps humain est segmenté en plusieurs régions anatomiques, interconnectées par des réseaux artériels, veineux, nerveux et articulaires. Dans la prise en charge du patient traumatisé, particulièrement en situation d'urgence, cinq régions spécifiques appelées «blood boxes» (littéralement «boîtes à sang») sont cruciales en raison du risque hémorragique élevé qu’elles présentent. Ces cinq segments incluent le thorax, l’abdomen, le bassin, et les deux fémurs, tous regroupant les principales zones anatomiques potentiellement vitales en cas de saignement majeur.
- Le Thorax : La région thoracique présente un risque élevé d’hémorragie en raison de la présence d’organes vitaux (cœur, poumons) et de gros vaisseaux (aorte ascendante, crosse aortique, aorte thoracique, veine cave supérieure et partiellement la veine cave inférieure). Une fracture costale déplacée peut entraîner une hémorragie d’environ 125 ml et présente un risque de lésion vasculaire ou organique.
- L’Abdomen : L’abdomen est également une région à fort risque hémorragique en raison des nombreux organes (estomac, intestins, foie, rate) et de gros vaisseaux (aorte abdominale, veine cave inférieure, artère hépatique, artère rénale) qu’il contient.
- Le Bassin : Le bassin, l’un des plus grands os plats du corps humain, est susceptible de provoquer des pertes sanguines massives en cas de fracture. Outre la fracture osseuse elle-même, des lésions vasculaires peuvent se produire, affectant notamment la partie inférieure de l’aorte descendante, la veine cave inférieure et les bifurcations artérielles et veineuses iliaques. La perte sanguine associée peut varier de 500 ml à plus de 4 litres, avec un risque élevé de décès en cas d’hémorragie incontrôlée.
- Les Fémurs : Les fémurs, les os les plus longs du corps, peuvent entraîner une perte sanguine importante en cas de fracture, estimée entre 1 et 2 litres. Les complications secondaires incluent des lésions de l’artère fémorale, de la veine iliaque, ou d’autres structures vasculaires adjacentes, augmentant la gravité de l'hémorragie.
Hémorragie associée aux fractures osseuses
Toute fracture osseuse génère une perte sanguine plus ou moins importante, selon la localisation et la gravité de la fracture. Par exemple, une fracture de l’humérus peut entraîner une perte de 500 à 750 ml de sang, et une fracture de l’un des os de l’avant-bras, entre 250 et 500 ml. Dans les membres inférieurs, une fracture tibiale peut causer une perte sanguine de 250 à 500 ml. Lors de traumatismes à haute énergie affectant plusieurs segments osseux, les pertes sanguines doivent être cumulées, augmentant significativement le risque de choc hémorragique.
Evaluation et surveillance hémorragique : le score A.B.C et la F.A.S.T. Echo
Les patients présentant des atteintes de ces zones doivent être étroitement surveillés.
Le score A.B.C
En cas d’estimation de perte sanguine importante (il existe plusieurs méthodes pour quantifier les pertes sanguines), l’utilisation du score A.B.C. (Assessment of Blood Consumption) peut être utile.
Il se définit par la recherche de 4 critères :
- Pression artérielle systolique ≤ 90 mmHg
- Fréquence cardiaque ≥ 120 battements par minute
- Présence d’une blessure pénétrante au tronc
- Présence d’un épanchement hémorragique décelable à l'échographie F.A.S.T. (Focused Assessment with Sonography in Trauma).
La présence de 2 de ces 4 critères justifie la mise en route d’un protocole de transfusion (parfois massive).
En contexte préhospitalier, l’utilisation de l’indice de choc est privilégiée pour sa rapidité, permettant une évaluation immédiate de la sévérité de l’hémorragie (La sévérité d’une hémorragie peut être estimée par l’indice de choc). Le shock Index est une simplification de ce score.
L'interet de la F.A.S.T. Echo
Chez le patient sévère ou instable, il est aussi recommandé d’estimer la cinétique des pertes sanguines par la répétition d’échographies FAST, particulièrement utiles en pré-hospitalier, afin de ne pas sous-estimer l'importance d'une hémorragie active et de suivre l'efficacité des thérapeutiques mises en œuvre.
Cela offre aussi la possibilité d'un bilan dynamique objectif, particulièrement utile pour préparer l'accueil du patient au déchocage (sévérité du patient, anticipation des complications, préparation de la transfusion hospitalière, nombre d'intervenants nécessaires à l'accueil du patient, etc.).