Avoir un bébé "dans" le ventre...
L’appareil génital féminin joue un rôle essentiel dans la reproduction, assurant des fonctions telles que la formation des ovules, la réception des spermatozoïdes, et la fourniture d’un environnement propice à la fertilisation et au développement embryonnaire.
Physiologiquement, la fécondation se fait dans le tiers distal de la trompe (dans l’ampoule de la trompe de Fallope) puis l’œuf migre dans la cavité utérine et entame sa nidation 7 jours plus tard. Contrairement à une croyance courante, l'ovulation n’est pas strictement alternée entre les deux ovaires.
Définition, épidémiologie et facteurs de risque de la grossesse extra-utérine (G.E.U.)
La grossesse extra-utérine (G.E.U.) est une anomalie caractérisée par une anomalie de nidation de l’embryon qui se produit en dehors de la cavité utérine, le plus souvent dans la trompe de Fallope (localisation tubaire ampullaire majoritaire).
Les localisations interstitielles (corne utérine), ovariennes, abdominales ou cervicales sont plus rares. Une forme rare mais importante à connaitre est la grossesse hétérotopique, associant une grossesse intra-utérine et une G.E.U., avec un risque accru dans le cadre de la procréation médicalement assistée (P.M.A.).
L’évolution naturelle d’une G.E.U. non diagnostiquée peut conduire à une rupture tubaire, provoquant un hémopéritoine, un choc hémorragique, et souvent le décès. Responsable de 10 % des décès au cours du premier trimestre, elle est considérée comme une urgence diagnostique et thérapeutique.
Il n’existe aucune donnée permettant de corréler l’âge gestationnel au risque de rupture tubaire. Le seuil minimal de β-HCG à risque de provoquer un danger pour la femme n’est pas connu. Toutefois, il est admis que plus la grossesse est avancée, plus le risque est important.
Médicalement, une G.E.U. se définit par : une cavité utérine échographiquement vide associée à des β-HCG > 1 500 UI
La G.E.U. survient généralement en raison d’une altération de la motilité tubaire, souvent liée à des antécédents infectieux, chirurgicaux ou inflammatoires des trompes.
Les dispositifs intra-utérins (D.I.U.) ne sont pas directement des facteurs de risque de GEU. Cependant, si une grossesse survient sous DIU, la probabilité qu’elle soit ectopique (G.E.U.) est plus élevée.
G.E.U. et contraception
La plupart des femmes en âge de procréer en France utilisent une contraception. Toutefois, la fiabilité de celles-ci n'est pas absolue. Pour chaque méthode contraceptive, il existe un indice, l'indice de Pearl, indiquant sa fiabilité. Cet indice reflète le nombre de grossesses survenant chez 100 femmes utilisant une méthode contraceptive donnée pendant une année.
- La pilule œstroprogestative, prise de manière parfaite, régulière et sans oubli, possède un indice de Pearl de 0,3. Cela signifie qu'il y aura 3 grossesses pour 1000 femmes par an.
- Pour le préservatif, utilisé correctement à chaque rapport sans aucun oubli, l'indice de Pearl est de 2. Dans la pratique, il est plutôt situé entre 13 et 18 (soit 130 à 180 grossesses pour 1000 femmes par an).
- Enfin, pour le D.I.U. au cuivre, l'indice est de 0,6, et pour le stérilet hormonal, il se situe entre 0,1 et 0,4, un chiffre comparable à celui de l'implant.
Une contraception bien conduite n'exclut donc pas une grossesse extra-utérine, mais elle réduit fortement le risque.
Diagnostic clinique et biologique
Les symptômes de la G.E.U. sont variables et peuvent inclure :
- Douleurs pelviennes et/ou métrorragies, parfois confondues avec des règles par les patientes.
- Absence d’aménorrhée : la patiente peut ignorer qu’elle est enceinte.
Une grossesse intra-utérine précocement identifiée rend la G.E.U. peu probable mais ne l’exclut pas formellement (grossesse hétérotopique). Une douleur pelvienne intense malgré la visualisation d'un sac gestationnel intra utérin doit faire rechercher ce diagnostic.
Le diagnostic de G.E.U. repose sur l’association de :
- Le dosage de la β-HCG :
- Le seuil échographique discriminant pour visualiser une grossesse intra-utérine par voie transvaginale est de 1 500 à 2 000 UI/L (à partir de 800 à 1000 UI/L avec les nouveaux appareils d'échographie). Si la cavité utérine est vide à ce niveau de β-HCG, une G.E.U. est fortement suspectée.
- Un taux de β-HCG isolé ne permet pas de déterminer un seuil minimal de risque de rupture ou de décès, mais des taux très élevés augmentent la probabilité de complications.
- L'échographie endovaginale : examen de choix pour localiser la grossesse et évaluer les signes indirects d’une G.E.U. Toutefois, une échographie sus pubienne est généralement suffisant pour évoquer une G.E.U.
L’examen gynécologique n’est pas indispensable pour éliminer une G.E.U. Ce dernier peut être réalisé dans un second temps par un spécialiste en cas de forte suspicion. Le dosage des β-HCG + l’échographie sus pubienne suffisent le plus souvent à évoquer ou éliminer une G.E.U.
Cas particuliers : grossesses chez les mineures et contexte spécifique
Les mineures peuvent présenter une G.E.U. dès qu’elles sont réglées et ont des rapports sexuels (consentis ou non).
L’évocation de ce diagnostic est d’autant plus difficile dans ce contexte (interrogatoire en présence de parents obligatoires jusqu’à 15 ans, difficulté à parler de sexualité durant l’adolescence, etc).
Ces situations imposent une attention particulière, avec un interrogatoire et une prise en charge adaptés, éventuellement en collaboration avec des structures médico-légales en cas de suspicion de violences sexuelles.
Pour rappel : selon l’article 227-25 du Code pénal « tout acte sexuel entre un adulte et un mineur de moins de 15 ans est considéré comme une atteinte sexuelle et nécessite un signalement [au Procureur de la République]. Le consentement d'un mineur de moins de 15 ans est juridiquement non valable pour des relations sexuelles avec un adulte, indépendamment du contexte ». Cela constitue une des rares levée du secret médical.
Conclusion
Le diagnostic précoce et la prise en charge rapide sont essentiels pour éviter les complications graves de la G.E.U.. Le traitement peut être médical (méthotrexate) ou chirurgical selon la situation clinique. Une approche multidisciplinaire incluant gynécologues et urgentistes est souvent nécessaire pour garantir une prise en charge optimale.
L'utilisation de plus en plus fréquente de l'échographie dans les services d'urgences permet une détection précoce des grossesses extra-utérines (G.E.U.), ce qui améliore considérablement le pronostic et prise en charge des patientes.