Les BNP dans l'insuffisance cardiaque

En réponse à un stress hémodynamique ou métabolique, l’organisme libère des biomarqueurs, véritables sentinelles biologiques du déséquilibre. Ces biomarqueurs sont cruciaux pour prédire l'apparition d'une pathologie, établir un diagnostic et évaluer la réponse d'un patient à un traitement. Parmi eux, les N-terminal pro Brain Natriuretic Peptide (NT-pro BNP) constituent des marqueurs significatifs de l'insuffisance cardiaque. Le terme "Brain" dans leur dénomination fait référence à leur découverte initiale dans des tissus cérébraux.

Sur le plan physiologique, les NT-pro BNP sont principalement synthétisés par les cardiomyocytes de l'oreillette gauche en réponse à une dilatation excessive, souvent due à une surcharge cardiaque. Ce processus de sécrétion commence par la formation de pré-pro BNP, suivi de pro BNP, pour aboutir au NT-pro BNP.
La fonction principale de ce peptide est d'exercer un effet natriurétique, en diminuant la réabsorption du sodium au niveau des tubules rénaux, ce qui favorise son excrétion urinaire induisant un fort effet diurétique. De plus, le NT-pro BNP inhibe l'activation du système rénine-angiotensine-aldostérone, tout en provoquant une vasodilatation périphérique, réduisant ainsi la charge de travail du cœur.

Selon le registre ALARM-HF, les symptômes d’insuffisance cardiaque aiguë à l’admission à l’hôpital sont une dyspnée de repos dans 73 % des cas, une orthopnée (63 %), une asthénie (44 %), des œdèmes des membres inférieurs (43 %), une augmentation de la pression veineuse jugulaire (40 %), une prise de poids (25 %), des extrémités froides (26 %).

Les antécédents cardiologiques parfois méconnus ou inexistants et un électrocardiogramme (ECG) le plus souvent normal ne permettent pas d’étayer ce diagnostic.

La radiographie thoracique peut parfois présenter des signes tels que l’augmentation de la taille du cœur, redistribution vasculaire, volume sanguin pulmonaire, épaississement péri-bronchique, distribution de l’œdème, épanchements pleuraux (Il existe deux formes d’œdème aigu du poumon). Elle peut toutefois paraître normale

... facilité par le dosage des BNP

Le dosage des NT-pro BNP est principalement pertinent pour éliminer un diagnostic d’insuffisance cardiaque chez un patient dyspnéique. Un taux de NT-pro BNP inférieur à 300 picogrammes par millilitre (pg/mL) permet d’exclure avec certitude une insuffisance cardiaque aiguë chez tous les patients.

Toutefois de nombreux facteurs confondants élèvent le taux de NT-pro BNP. Le plus courant est l’âge mais ce taux est aussi plus élevé en cas d’insuffisance rénale, de fibrillation atriale, chez les femmes, les patients obèses, anémiques ou septiques, etc.
Il est donc nécessaire d’interpréter le résultat en fonction de ces critères.

Il est couramment admis que les seuils de probabilité élevé d’insuffisance cardiaque ne s’adaptent qu’à l’âge :  

• Moins de 50 ans : NT-pro BNP > 450 pg/mL.
• Entre 50 et 75 ans : NT-pro BNP > 900 pg/mL.
• Plus de 75 ans : NT-pro BNP > 1800 pg/mL

Conclusion 

Bien que le dosage du NT-pro BNP permette un dépistage rapide de l'insuffisance cardiaque aiguë, facilitant ainsi une intervention précoce en situation critique, il est aussi particulièrement utile pour le suivi des patients. La cinétique de ce peptide offre une évaluation précise de l'efficacité thérapeutique, permet d'établir le seuil basal propre à chaque patient et facilite la détection précoce d’une potentielle aggravation de la pathologie cardiaque.

La comparaison du taux basal (= taux habituel) de BNP, souvent connu des patients insuffisants cardiaques chroniques, et du taux retrouvé aux urgences permet d'affirmer ou non le diagnostic de poussée d'insuffisance cardiaque aiguë.

En résumé, le NT-pro BNP est un biomarqueur qui contribue à une prise en charge plus précise et individualisée, tout en permettant une gestion proactive des exacerbations d’insuffisance cardiaque. Intégré dans une approche multimodale, le NT-pro BNP constitue donc un outil diagnostique et pronostique de premier ordre, adapté aussi bien aux situations aiguës qu’au suivi longitudinal des patients insuffisants cardiaques.