La triade létale se définit comme un cycle auto-entretenu de perturbations homéostatiques, dont le début se traduit par une perte soudaine et brutale de sang. Une fois ce phénomène débuté, le corps entre dans un cercle «vicieux» de dysfonctionnement entre trois problématiques : l’hypothermie, l’acidose et la coagulopathie. Ces trois problèmes sont étroitement liés et se potentialisent les uns par rapport aux autres.
L’hypothermie : Elle est fréquente chez le patient traumatisé sévère : environ 2/3 des patients pris en charge présentent une température < 36°C. Elle est liée à une diminution de la production de chaleur du patient (immobilité du patient) et à la déperdition de chaleur (remplissage par solutés froids, effraction de la barrière cutanée, environnement extérieur…). De plus le sang à un rôle de transport de la chaleur produite par certains organes et c’est grâce à lui que le corps peut réguler sa température. Une hémorragie entraine donc une diminution de «liquide chaud», et donc une diminution de la chaleur corporelle.
Cette hypothermie entraine alors un allongement des temps de coagulation en inhibant l’efficacité des différents facteurs de coagulation et des plaquettes. A savoir que -1° C de température corporelle entraine une baisse de 10 % de la fonction d’hémostase.
La coagulopathie : Elle est favorisée par 3 facteurs : l’hypothermie (vue précédemment), l’hémodilution et les anomalies plaquettaires.
L’hémodilution va débuter avec la perte sanguine. Une partie des facteurs de coagulation et des plaquettes vont être perdus directement avec le saignement et par la formation d’hématomes recrutant une certaine quantité de facteurs de coagulation pour éviter un phénomène d’auto-alimentation hématique. La perte sanguine va entrainer une vasoconstriction, une hypotension et une redistribution de la circulation sanguine. L’eau contenue dans le milieu interstitiel va migrer vers les composants vasculaires du fait du changement de pression osmotique et va ainsi créer une première dilution des éléments de coagulation encore présents dans le milieu vasculaire. Secondairement l’hémodilution va se maintenir par la mise en place d’un remplissage vasculaire par cristalloïde et/ou colloïdes, avant l’utiliser des produits sanguins (comme la transfusion, par exemple).
Les anomalies plaquettaires sont quantitatives et qualitatives :
- Quantitatives par le fait de la consommation de celles-ci lors du saignement, pour participer à la formation de clou plaquettaire.
- Qualitative principalement au cours de l’hypothermie, qui va générer une altération de l’expression à la surface des molécules avec des troubles de l’activation, de l’adhésion et de l’agrégation plaquettaire.
In fine, la coagulopathie du traumatisé sévère est un processus complexe avec de multiples implications : la (les) lésions tissulaire(s), l’état de choc, l’hémodilution, l’hypothermie, l’acidose et l’inflammation.
L’acidose : L’altération du pH est une bonne prédiction pour le risque de coagulopathie. Elle est directement liée à la perte sanguine et à l’hypoperfusion tissulaire. Elle traduit une souffrance organique. Elle est due à l’accumulation des métabolites (acide lactique) pour donner suite à l’hypoperfusion tissulaire, une diminution de la fonction rénale qui génère une diminution des ions H+ et à une accumulation excessive en bases. L’acidose engendre une diminution de l’efficacité des facteurs de coagulation et un allongement du temps de céphaline active (T.C.A.).
Comment lutter contre cette triade létale ?
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Secouriste
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Paramédicale
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Médicale
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Hémorragie
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- Compression manuelle directe
- Pose d’un garrot
- Mise en place d’une ceinture pelvienne
- Pose de pansement hémostatique
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- Pose de VVP
- Remplissage par solutés cristalloïdes
- Transfusion
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- Damage control chirurgical
- Embolisation
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Hypothermie
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- Perfusions réchauffées
- Couvertures chauffantes
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Coagulopathie
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- Remplissage raisonné
- Hypotension permissive en absence de traumatisme crânien
- Complexes pro-thrombiques immuns, antagonisations, AVK
- Acide tranexamique
- Facteur de coagulation recombinants
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Acidose
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- Mesure et surveillance de la lactatémie
- Mise en place de traitement correcteur (ions, bicarbonates…)
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